Depuis 2010, le festival Normandie Impressionniste a lieu tous les 3-4 ans durant le printemps et l'été (exceptionnellement cette année été et automne). De nombreuses expositions ont lieu dans divers musées normands. J'ai décidé d'en visiter plusieurs. Voici la première qui a lieu au musée de Caen jusqu'au 22/11. Je vous en fais un résumé.
Quelques années après qu'Armand Guillaumin ait exposé une toile, consacrée au paysage industriel, lors du premier salon impressionniste de 1874. Le critique Joris-Karl Huysmans encourage les peintres à exprimer "toute cette fièvre moderne que présente l'activité de l'industrie."
Armand GUILLAUMIN (1841-1927), Neige à Ivry (1873), huile sur toile. Genève, Association des amis du Petit Palais.
Les ports et les rives industrielles constituent des lieux d'inspiration. Le regard du peintre se partage entre le spectacle des travailleurs (mêlés aux badauds) et l'observation d'un nouvel outillage moderne (drague, grue). Les hommes de peine, dockers, coltineurs, cribleurs de sable... sont les sujets de nombreuses oeuvres.
Henri GERVEX (1852-1929), Le Coltineur de charbon (1891), huile sur toile. Lille, Palais des Beaux-Arts.
Armand GUILLAUMIN, Le cribleur de sable (1891), huile sur toile. Genève, Association des Amis du Petit Palais.
Armand GUILLAUMIN, Pont d'Arcole vue du quai de l'hôtel de ville (1878), huile sur toile. Genève, Association des Amis du Petit Palais.
Camille PISSARRO (1830-1903), L'Anse des Pilotes, Le Havre, matin, marée montante (1903), huile sur toile. Le Havre, musée d'Art moderne André Malraux.
Dans le Paris post-haussmannien, les travaux sont nombreux en vue des expositions universelles, pour l'extension des voies ferrées et la construction du métro. Au milieu de ce chantier, les artistes font autant attention à la structure géométrique des échafaudages qu'à l'énergie des ouvriers.
Paul-Désiré TROUILLEBERT (1829-1900), Travaux de relèvement du chemin de fer de la ceinture, le pont de la rue de la Voûte (1888), huile sur toile. Paris, musée d'Orsay.
Jules-Charles AVIAT (1844-1931), Le Chantier du lycée Lakanal à Sceaux (1884), huile sur toile. Musées de Chambéry.
Frantisek KUPKA (1871-1957), Couvreurs sur les toits de Paris, encre de chine, fusain et aquarelle, Collection Dixmier.
Frantisek KUPKA, Les Mystères de la construction du métropolitain, encre de Chine et gouache sur papier. Collection Jean-Louis Milin.
Maximilien LUCE (1858-1941), La Construction du Sacré-Coeur (1900), huile sur toile. Genève, Association des Amis du Petit Palais.
Les artistes entreprennent de peindre les cortèges d'ouvriers, qui tôt le matin ou tard le soir, entrent dans les manufactures ou en ressortent. Leurs oeuvres sombres témoignent des difficiles conditions du labeur.
Raoul DUFY (1877-1953), Fin de journée au Havre (1901), huile sur toile. Le Havre, musée d'art moderne André Malraux.
Le tisserand et la repasseuse illustrent la permanence d'une activité domestique, proto-industrielle. Payés à la pièce, ils travaillent de manière épisodique, maintenus tous deux dans une dépendance forte de celui qui leur passe commande.
Louis-Joseph ANTHONISSEN (1849-1913), Atelier de repasseuses à Trouville (1888), huile sur toile. Pau, musée des Beaux-Arts.
Albert DECAMPS (1862-1908), L'Apprenti tisserand, huile sur toile. Abbeville, musée Boucher de Perthes.
La main-d'oeuvre féminine pénètre massivement l'usine au gré de la mécanisation : le travail des femmes s'exporte hors du foyer.
Ferdinand-Joseph GUELDRY (1858-1945), Filature du nord, scène de triage de la laine (1913), huile sur toile. Roubaix, La Piscine.
Dans son roman "L'Assommoir", Zola nous baigne dans la sombre vie d'ouvriers. Les peintres vont continuer dans ce naturalisme sombre et décrivent la réalité humaine des métiers de l'artisanat et de l'industrie. Attentifs aux gestes, costumes et outils, ils signent des oeuvres âprement documentaires.
Mathieu MERLIN (1853-1913), Les Ravaleurs (1886), huile sur toile. Nevers, musée de la Faïence et des Beaux-Arts.
Maximilien LUCE, Fonderie à Charleroi, la coulée (1896), huile sur toile. Mantes-la-Jolie, musée de l'Hôtel-Dieu.
Les raisons pouvant conduire à la suspension du travail sont multiples : le chômage, l'accident, la grève, la manifestation.
Théophile-Alexandre STEINLEN (1859-1923), Caisse de grève (1901), lithographie en couleurs. Paris, Bibliothèque Nationale de France.
Théophile-Alexandre STEINLEN, Manifestation populaire (vers 1903), huile sur toile. Tourcoing, MUba Eugène Leroy.
Léonie HUMBERT-VIGNOT (1878-1960), Un jour de grève : L'Attente, Le Défilé, La Mort (1910), huile sur toile. Lyon, musée des Beaux-Arts.
Cette exposition était intéressante. J'y ai découvert des peintres. Et j'ai pu visualiser le Paris ouvrier du XIXe siècle que j'ai lu dans Zola. Le catalogue de l'exposition : "Les villes ardentes (1870-1914), Ed. Snoeck, 2020 (200p.)" est un petit livre imprimé sur du papier glacé. On y retrouve toutes les oeuvres exposées. Mais, elles sont reproduites en petit format et il n'y a pas d'index. C'est bien dommage !