Cette année, les peintres finlandais étaient à l'honneur à Paris. En parallèle de l'exposition sur Albert Edelfelt (1854-1905) au Petit Palais, une exposition sur Akseli Gallen-Kallela (1865-1931) avait lieu au musée Jacquemart-André. Une rétrospective lui avait été consacré en 2012 au musée d'Orsay. Je ne l'avais pas vu. Ce fut donc une découverte pour moi. Voici le résumé, d'après les panneaux explicatifs et les oeuvres coups de coeur.
Né à Pori au Sud-Ouest de la Finlande, Gallen-Kallela (1865-1931) fréquente l'école de dessin de la Société des Beaux-Arts d'Helsinki. Puis de 1884 à 1889, il séjourne à Paris pour suivre les cours de William Bouguereau (1825-1905). Et, il s'inscrit à l'atelier du peintre Fernand Cormon (1845-1924). Albert Edelfelt (1854-1905) le guide et soutient son ambition. Les débuts de Gallen-Kallela sont marqués par un style naturaliste. C'est pendant les étés finlandais qu'il peint des sujets inspirés par sa terre natale et ses habitants.
Au cours de l'été 1888, Gallen-Kallela commence à peindre l'oeuvre monumentale La Légende d'Aïno pour l'Exposition Universelle de 1889. Inspirée par le mythe finlandais du Kalevala : elle représente une jeune fille qui est promise en mariage au vieux Väinämöinen. Elle s'enfuit préférant la noyade à l'union. Repêchée métamorphosée en poisson, elle reprend son corps de femme et s'enfuit de nouveau. Cette oeuvre remporte un grand succès. Le Sénat finlandais lui commande une seconde version qui lui permet de voyager en Carélie avec sa femme Mary Slöör, en quête des sites originels du Kalevala.
Après avoir parcouru la Carélie et la Laponie, c'est aux abords du lac de Ruovesi, dans une contrée peu habitée et difficile d'accès, que Gallen-Kallela construit sa maison-atelier. Construite en 1894-1895 et baptisée Kalela, il en conçoit l'architecture et la décoration intérieure.
Kalela est un lieu d'échanges artistiques mais aussi propice à l'isolement, loin de l'agitation des villes. C'est aussi à cette période que Gallen-Kallela explore d'autres domaines artistiques : la gravure et les arts graphiques et décoratifs lors de séjours à Berlin et Londres.
Gallen-Kallela, Ex-libris Mary et Axel Gallén (1896), gravure sur bois. Musée Gallen-Kallela, Espoo.
Ses premières gravures sont marquées par le deuil, car sa fille meurt à cette période. Dans sa série La Mort et la fleur, le thème de la jeune fille et la mort est représenté par le motif de la fleur à peine éclose et déjà coupée. Il revient à cette image en 1902 dans Printemps, oeuvre appartenant au mausolée de la jeune Sigrid Jusélius (1887-1898). Gallen-kallela se consacre au décor monumental du mausolée de 1901 à 1903. Seuls en subsistent aujourd'hui des travaux préparatoires. Les peintures ont été ravagées par un incendie du mausolée situé dans le cimetière de Käppärä.
Gallen-Kallela, Etude pour la décoration de la voûte (1901), aquarelle sur papier. Helsinki, Fondation Sigrid Jusélius.
Gallen-Kallela puise son inspiration dans la mytholgie finlandaise dès sa jeunesse. Son voyage en Carélie a pour but d'explorer les terres où l'ethnologue Elias Lönnrot (1802-1884) a recueilli les légendes du Kalevala. Gallen-Kallela pense que ces lieux ont conservé la mémoire des héros mythiques. Alors, il conçoit une série de gravures sur le thème du Kalevala.
Gallen-Kallela, La Rivière des morts (1893), technique mixte sur toile. Villa Gyllenberg, Fondation Signe et Ane Gyllenberg, Helsinki.
Gallen-Kallela se passionne pour l'observation des étoiles avant son installation dans la maison-atelier. La lecture des ouvrages de Camille Flammarion et l'étude des premières illustrations scientifiques du ciel alimentent sa peinture.
Gallen-Kallela, Cosmos - projet pour le mausolée de Sigrid Juselius (1902), huile sur toile. Fondation Sigrid Juselius, Helsinki.
Gallen-Kallela, Ad astra (1907), huile sur toile, cadre avec volets en bois doré. Villa Gylenberg, Fondation Signe et Ane Gyllenberg, Helsinki.
Le paysage finlandais
Lors des salons parisiens et expositions universelles du XIXe siècle, la Finlande se démarque des autres pays européens par ses innombrables lacs, qui font sa particularité. Les paysages enneigés et les vastes étendues prises par les glaces constituent l'identité finlandaise. Gallen-Kallela réalise des vues époustouflantes et un grand silence se dégage de ces oeuvres hivernales, peintes sur le motif ou a l'aide de photographies. De 1901 à 1904, ses oeuvres exposées à Vienne impressionnent les collectionneurs. Au salon d'Automne de 1908 à Paris, une section est consacrée à la Finlande et suscite une forte réaction parmi les artistes finlandais.
Gallen-Kallela, Ombres bleues sur la glace, lac de Ruovesi en hiver (1916), huile sur toile. Collection Carl Gustaf Ehrnrooth.
Gallen-Kallela retourne à Paris se confronter au fauvisme et se familiariser avec l'oeuvre de Paul Gauguin (1848-1903), qui est désormais reconnu comme le maître de la couleur. Mêlant fauvisme et expressionnisme, le tableau Les skieurs montre une nouvelle liberté et une palette très vive.
Gallen-Kallela, Les skieurs, Akseli et Jorma Gallen-Kallela (1909), huile sur toile. Collection particulière.
Gallen-Kallela part à la découverte de son environnement, pinceau et palette à la main, et se déplace dans un rayon très large à la recherche de sujets pour ses peintures. L'hiver, il skie jusqu'à 60 km par jour. L'été, il se promène à pied ou en bicyclette. Installé sur des hauteurs, il produit des vues panoramiques. Certains paysages de lacs, conçus depuis une barque, adoptent un format carré où le regard se perd dans un jeu de reflets entre le ciel et l'eau.
Gallen-Kallela, Nuages d'orage à l'horizon (1897), huile sur toile. Fondation Gösta Serlachius , Mänttä.
Le catalogue de l'expostion : "Gallen-Kallela mythes et nature, Ed. Fonds Mercator, 2022, (183p.)" est un petit livre, imprimé sur du papier mat. Toutes les oeuvres sont reproduites. D'autres oeuvres non exposées illustrent le catalogue. J'ai bien aimé cette exposition. En particulier, les tableaux de paysages qui laissaient vraiment croire qu'on regardait une photo !