Toyen, l'écart absolu

Publié par Faustine sur 27 Août 2022, 13:42pm

Catégories : #exposition, #surréalisme, #peinture tchèque du XXe

Après Prague et Hambourg, c'est au Musée d’Art Moderne de Paris de consacrer à Toyen (1902-1980), artiste majeure du surréalisme, une rétrospective regroupant 150 œuvres (peintures, dessins et livres), venant de musées et collections privées. Cette exposition était organisée de manière chronologique. Voici le résumé, d'après les panneaux explicatifs et les oeuvres coups de coeur :

Toyen, Prague (1919). Paris, collection particulière.

Ses débuts (1919-1929)

Marie Cerminova, dite Toyen est née à Prague. Elle y fit ses études à l'école des arts appliqués. En 1922, elle rencontre le peintre Jindfrich Styrsky (1899-1942) en Croatie. C'est le début d'une collaboration à vie. De retour à Prague, ils rejoignent le groupe Devetsil (groupe artistique de l'avant-garde) et participent aux expositions.

Jindrich Styrsky, Josef Hasa et Toyen dans leur atelier, Prague (1929). Paris, collection particulière.

Toyen, Café (1922), huile sur carton. Paris, collection particulière.

Entre 1924 et 1929, Toyen et Styrsky voyagent en Europe, séjournent à Paris et y exposent. Fascinée par la diversité des spectacles, cirques, music-hall, fêtes foraines..., Toyen réalise en 1925 une série de tableaux "primitivistes".

Toyen, Port (1925), huile sur toile. Paris, centre Pompidou.

Toyen, Les Avaleurs d'épées (1925), huile sur toile. Prague, galerie Zlata Husa.

Toyen, Le Cirque Conrado (1925), huile sur toile. Collection particulière.

Toyen, Les Danseuses (1925), huile sur toile. Galerie nationale de Prague.

Toyen, Les Rois mages (1925), huile sur toile. Collection particulière, avec l'aimable autorisation de la galerie KODL.

Toyen, Printemps (1925), huile sur toile. Collection particulière, avec l'aimable autorisation de la galerie KODL.

Toyen, Le Paradis des Noirs (1925), huile sur toile. Collection particulière, avec l'aimable autorisation de la galerie KODL.

En 1926, Toyen et Styrsky définissent leur vision commune sous le nom d'artificialisme, visant à provoquer des émotions poétiques qui ne sont pas seulement optiques.

Affiche de l'exposition à la Galerie d'art contemporain. Paris, (1926).

Toyen, Plage (1926), huile sur papier sur carton. Kutna Hora, GASK - galerie de la Bohême centrale.

Toyen, Scaphandrier (1926), huile sur toile. Prague, Kunsthalle.

Toyen, Fata Morgana (1926), huile sur toile. Hluboka nad Vitavou. Galerie Ales de la Bohême du Sud.

Jindrich Styrsky et Toyen, Couverture pour la Dame à la fontaine de Karel Schulz. Prague, L. Kuncif (1926). Bibliothèque municipale de Prague.

Les années 30

Avec le début des années 1930, une violence s'empare de l'espace de Toyen, dévoilant des formes venues des profondeurs. De moins en moins la flore se distingue de la faune dans une nuit intérieure que Toyen ne quitte plus des yeux.

Toyen, Au Nord (1931), huile sur toile. Prague, Retro Gallery.

Toyen, Anémones de mer (1931). Huile sur toile. Hluboka nad Vltavou, galerie Ales de la Bohême du Sud.

Toyen, Des mers du Sud (1931), huile sur toile. Kutna Hora, GASK - galerie de la Bohême centrale.

Toyen, Flore de sommeil (1931), huile sur toile. Olomouc, musée des Beaux-Arts.

Toyen, Dans le brouillard (1933), huile sur toile. Galerie de la ville de Prague.

Toyen, Le Spectre jaune (1934), huile sur toile. Collection particulière.

Toyen, La Voix de la forêt II (1934), huile sur toile. Saint-Denis, musée d'art et d'histoire Paul-Eluard.

Toyen, Naufrage dans un rêve (1934), huile sur toile. Collection particulière, avec l'aimable autorisation de la galerie KODL.

Toyen, Larve I (1934), huile sur toile. Hluboka nad Vltavou, galerie Ales de la Bohême du Sud.

A la même période, elle découvre les écrits de Sade (1740-1814) et sa vision pansexuelle. De 1930 à 1933, elle est aux côtés de Styrsky, bravant la censure. Elle illustre de nombreux textes et publie ses propres dessins qui montrent l'importance qu'elle accorde à la dimension érotique.

Styrsky et Toyen, Prague galerie Ales novembre 1931. Paris, collection particulière.

Toyen, Sans titre (Rêve de jeune fille) 1930, encre de Chine et aquarelle. Collection Mony Vibescu.

Toyen, Sans titre (Trois clowns) 1931, crayon et aquarelle. Collection Mony Vibescu.

Toyen, Illustration pour la Vie des nonnes de Pietro Aretino (1932), encre de Chine. Prague, galerie Maldoror.

Toyen, Frontispice pour la traduction tchèque de Justine ou les Malheurs de la Vertu du marquis de Sade (1932). Prague, collection Mony Vibescu.

Toyen figure parmi les fondateurs du Groupe des surréalistes en Tchécoslovaquie. Jusqu'à la fin de sa vie, elle restera fidèle à cet engagement. Dès le milieu des années 30, ces tableaux évoquent la catastrophe qui se prépare. Deux séries de dessins Les Spectres du désert et Seules les crécerelles pissent tranquillement sur le Décalogue en rendent compte de manière prémonitoire.

Catalogue de la première exposition du Groupe des surréalistes en Tchécoslovaquie, Pragues, 1935. Paris, collection particulière.

Toyen, La Dormeuse (1937), huile sur toile. Collection particulière.

Toyen, Objet-fantôme (1937), huile sur toile. Prague, galerie Zlata Husa.

Toyen, Figure (Spectre), 1937, encre de chine et aquarelle sur papier. COLLETT Prague, Munich.

Toyen, Dessin pour Seules les crécerelles pissent tranquillement sur le Décalogue de Jindrich Heisler (1939), encre de chine sur papier. Collection particulière.

Toyen et Jindrich Heisler, Les Spectres du désert. Paris, Albert Skira, 1939. Paris, collection particulière

Pendant la guerre

Dès les débuts de la guerre. Toyen cherche à saisir l'horreur en s'en remettant de plus en plus à la rigueur de son dessin. Elle y parvient magistralement à travers les grands cycles que sont Tir (1939-1940) et Cache-toi, guerre ! (1940-1944). Elle figure un monde dont tout horizon a disparu, mais où ne subsistent, que jouets brisés et spectres animaux, témoins muets de l'innocence et du merveilleux anéantis.

Toyen, Dessin du cycle Tir (1939), encre de chine sur papier. Collection Camacho-Gruger.

Toyen, Dessin du cycle Tir (1940), encre de chine sur papier. Avec l'aimable autorisation de la galerie Natalie Seroussi.

Toyen, Dessin du cycle Le jour et la nuit (1940), crayon et crayons de couleur sur papier. Collection particulière.

Toyen, dessin du cycle Cache-toi, guerre ! (1944), encre de chine rehaussée à la craie blanche et à la craie de couleur sur papier. Galerie nationale de Prague.

Toyen, Dessin du cycle Cache-toi, guerre ! (1944), encre de chine sur papier. Paris, collection particulière.

En 1941, Toyen cache chez elle Jindfrich Heisler traqué en tant que juif. Elle compose avec lui une suite de photo-poèmes : Depuis les casemates du sommeil. Avec l'aide de photographes professionnels des poèmes de Heisler sont mis en scène en étant intégrés dans un paysage fait de jouets. Chaque planche évoque des vitrines de Noël de grands magasins.

Toyen et Jindrich Heisler, Prague, 1939. Paris, collection particulière.

Toyen et Jindrich Heisler, Depuis les casemates du sommeil (1940-1941), photo-poèmes. New-York, Ubu Gallery.

Toyen et Jindrich Heisler, Depuis les casemates du sommeil (1940-1941), photo-poèmes. New-York, Ubu Gallery.

Toyen, Guignol (1941), huile sur toile. Galerie nationale de Prague.

Toyen recommence à peindre en 1942 dans une période de haute révolte. Dans ses tableaux, elle fait preuve d'une virtuosité tragique.

Toyen, Relâche (Après la représentation), 1943. Huile sur toile. Hluboka nad Vltavou, galerie Ales de la Bohême du Sud.

Toyen, A la lisière (1945), fusain et pastel sur papier. Prague, Kunsthalle.

Toyen, La Guerre ou l'Epouvantail de campagne (1945), huile sur toile. Fonds de dotation 8SMICKA;

Toyen, A la table verte (1945), huile sur toile. Collection particulière.

Toyen, L'Avant-printemps (1945), huile sur toile. Paris, Centre Pompidou.

Toyen, Mythe de la lumière (1946), huile sur toile. Stockholm, Moderna Museet.

Toyen, Le Coffre-fort (1946), huile sur toile. Collection Géraldine Galateau.

Toyen, Loi naturelle (1946), huile sur toile. Avec l'aimable autorisation de la galerie Natalie Seroussi.

Les années 50

En 1947, Toyen s'exile à Paris avec Heisler pour fuir le totalitarisme stalinien qui s'abat sur l'Europe centrale. A cette période, Toyen mise une fois de plus sur le dessin. Elle saisit l'instant ou êtres et choses se frôlent et se rejoignent. Le but est de suggérer quelle transmutation est à l'origine des bouleversantes apparitions, auxquelles on assiste toile après toile.

Toyen, La Lune se voile Dessin du cycle Ni ailes, ni pierres : ailes et pierres (1948), encre de chine et aquarelle sur papier. Paris, collection particulière.

Toyen, Nouent et renouent (1950), huile sur toile. Collection particulière, avec l'aimable autorisation de la galerie KODL.

Toyen, Tous les éléments (1950), huile sur toile. Collection particulière, avec l'aimable autorisation de la galerie KODL.

Toyen, Au visage bleu (1951), huile sur toile. Collection particulière.

Toyen, On entend de loin le bruit de pas (1955), huile sur toile. Collection particulière.

Toyen, Tu t'évapores dans un buisson de cris (1956), huile sur toile. Collection particulière.

Toyen, ils me frôlent dans le sommeil (1957), huile sur toile. Paris, collection particulière, avec l'aimable autorisation de la Galerie 1900-2000.

En 1957, Toyen réalise une série de tableaux "Les Sept épées hors du fourreau" qui évoquent la femme à travers des métamorphoses révélant le mimétisme amoureux du règne animal, végétal et minéral.

Toyen, La Belle ouvreuse du cycle Les Sept épées hors du fourreau (1957), huile sur toile. Collection particulière.

Toyen, Mélusine du cycle Les Sept épées hors du fourreau (1957), huile sur toile. Collection particulière.

Toyen, La Dame blanche du cycle Les Sept épées hors du fourreau (1957), huile sur toile. Collection particulière.

Toyen, illustration pour Histoire natuelle de Péret (Ussel, 1958). Paris, collection particulière.

Le surréalisme et l'amitié

Tout au long de l'exposition, on pouvait découvrir de nombreuses photos évoquant des moments partagés. On pouvait aussi lire des correspondances et oeuvres adressées à Toyen de la part de ses amis surréalistes : Jindrich Heisler, André Breton, Paul Eluard, Benjamin Péret (1899-1959), Yves Tanguy (1900-1955), Victor Brauner... Toyen illustra de nombreuses oeuvres de ses amis.

Jindrich Heisler, André Breton, Toyen et Benjamin Péret (île de Sein, 1948). Paris, collection particulière.

Lettres de Yves Tanguy à Toyen (Paris, 1935). Paris, collection particulière.

Yves Tanguy, Hommage à Toyen (1935), huile sur carton. Paris, collection particulière.

Lettre de Paul Eluard à Toyen (1935). Paris, collection particulière.

Victor Brauner, A Toyen son ami Victor Brauner, 24 avril 1947. Stylo bille et pastel sur papier. Paris, collection particulière.

Victor Brauner, A ma chère Toyen en bonne amitié du somptueux Bruderschaft à la lune pleine du 30 août 1947. Encre de chine et crayons de couleur sur papier. Paris, collection particulière.

Victor Brauner, "Souvenir de la peinture de Toyen" pour ma très chère Toyen son ami Victor Brauner, 13 décembre 1947. Encre sur papier. Paris, collection particulière.

Victor Brauner, Toyen, amie uni dans la projection géante du sensible pour régénéré l'univers, son ami Victor 7 février 1948. Encre de chine et pastel sur papier de couleur. Paris, collection particulière.

Carte postale de Meret Oppenheim à Toyen (Berne, Janvier 1958). Paris, collection particulière.

Carte postale de Konrad Klapheck (Düsseldorf, Juin 1962). Paris, collection particulière.

Jean Benoît, L'écart absolu, c'est toi, Toyen (1965), plâtre et cuir. Paris, collection particulière.

Toyen, Couverture de la traduction tchèque de "Vases communicants" d'André Breton (Prague, 1934). Paris, collection particulière.

Toyen, Portrait de Benjamin Péret (1965), pointe sèche. Paris, collection particulière.

Le monde obscur des années 60

En 1968, Toyen choisit d'intituler l'une de ses toiles comme le texte de Charles Fourier (1772-1837) qui ne fut publier qu'en 1967. L'utopie de ce "nouveau monde amoureux" rencontre l'espace de l'éperdu qu'elle aura construit. En 1966, elle propose une série de 12 dessins à Radovan Ivsic pour qu'il les illustre de ses textes. Elle était désireuse de savoir quels mots feraient écho à ce qu'elle avait conçu.

Toyen, Le Nouveau Monde amoureux (1968), huile sur toile et collage. Paris, collection particulière.

Toyen, Le Rêve (1964), huile sur toile. Paris, collection particulière.

Toyen, Le Paravent (1966), huile et collage sur toile. Musée d'Art moderne de Paris.

Toyen, Cycles Débris de rêves pour le Puits dans la tour de Radovan Ivsic (1966), pointes sèches rehaussées à l'aquarelle. Paris, collection particulière.

Toyen, Mirages (1967), huile sur toile. Collection particulière avec l'aimable autorisation de Cyrille de Gunzburg.

La coïncidence des dates avec les évènements de mai 68 est révélatrice de la sensibilité de son regard. Chaque tableau ouvre sur une "chambre secrète sans serrure" où trouve forme l'indéfinissable de l'amour.

Toyen, Not disturb (1968), huile sur toile. Paris, collection particulière.

Toyen, Eclipse (1968), huile sur toile. Collection particulière.

Toyen, Reflet de marée basse (1969), huile sur toile. Collection particulière, avec l'aimable autorisation de la galerie KODL.

Toyen, Le festin analogique (1970), huile sur toile. Paris, collection particulière.

Toyen, Le Piège de la réalité (1971), huile sur toile. Paris, collection particulière.

Collages des années 70

C'est aussi à cette sensibilité de la vue qu'il faut relier la nouveauté de collages, auxquels Toyen va de plus en plus se consacrer. Qu'il s'agisse du recueil Vis-à-vis ou des masques-collages pour une mise en scène du Roi Gordogane de Radovan Ivsic, elle y radicalise la conception romantique du fragment.

Toute sa vie, Toyen a constitué des recueils d'images. Ces recueils étaient ciblés. Entre rêve d'une collection infinie venu de l'enfance et livre d'images, ces albums témoignent d'une insatiable curiosité et d'un continuel émerveillement envers l'image.

Toyen, Albums d'images. Paris, collection particulière.

Toyen, Sans Titre (1972), encre de chine, aquarelle et collage sur papier. Paris, collection particulière.

Toyen, Vis-à-vis (1973), collages. Paris, collection particulière.

Toyen, Masques pour la pièce de théâtre le Roi Gordogane de Radovan Ivsic (1976). Collages. Paris, collection particulière.

Toyen, Masques pour la pièce de théâtre le Roi Gordogane de Radovan Ivsic (1976). Collages. Paris, collection particulière.

Toyen, illustrations pour La Forêt sacrilège de Jean-Pierre Duprey (1970), pointes sèches sur soie

C'est la 2ème exposition surréaliste que je vois au Musée d'Art Moderne. Celle-ci était beaucoup moins explicite que celle sur Victor Brauner où on nous faisait découvrir ses inspirations et quelques éléments symboliques. Pour Toyen, ce n'était pas du tout le cas. Ce qui n'aidait pas à l'interprétation des tableaux. Mais, ça ne m'a pas empêché de prendre du plaisir à regarder ces oeuvres.

Le catalogue de l'exposition n'est pas plus facile à maîtriser, car la mise en page place les oeuvres dans un ordre assez aléatoire souvent sans contexte avec le texte du chapitre. C'est donc très compliqué de s'y retrouver... "Toyen, l'écart absolu, Ed. Paris musées, 2022, (352p.)" est un livre de format A4 avec une couverture souple.

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