L'année dernière, à l'occasion du bicentenaire de la naissance de Rosa Bonheur, une exposition lui a rendu hommage. Cette exposition contenant environ 200 oeuvres a eu lieu d'abord au musée des Beaux-Arts de Bordeaux, ville native de Rosa Bonheur, puis au musée d'Orsay. Rosa Bonheur peignait principalement les animaux. Ce fut la première femme artiste a recevoir la légion d'honneur. Voici le résumé de l'exposition d'après les panneaux explicatifs, accompagné des oeuvres coup de coeur.
Marie-Rosalie Bonheur naît à Bordeaux dans une famille d'artistes : son père Raymond Bonheur (1796-1849) est peintre, sa mère Sophie Marquis est cultivée et musicienne. Ses frères et soeurs cadets sont devenus artistes : Auguste Bonheur (1824-1884) est peintre, Isidore Bonheur (1927-1901) est peintre-sculpteur, Juliette Bonheur (1830-1891) est aussi peintre. Ils s'installent à Paris en 1829. Passionnée par les animaux qu'elle dessine dès son enfance, Marie-Rosalie quitte l'école à 13 ans pour rejoindre l'atelier de son père. Elle alternera leçons de dessin en atelier et séances en plein air dans les bois. En 1841, elle participe au Salon et se fait remarquer avec son tableau "Deux lapins". Deux ans plus tard, elle signe ses tableaux "Rosa Bonheur" en souvenir du diminutif que lui donnait sa mère morte en 1833.
Raymond Bonheur, Rosa Bonheur enfant (vers 1826), huile sur toile. Barbizon, musée départemental des peintres de Barbizon.
Jules Laurens, d'après Isidore Bonheur , Cheval (écorché) (n.d.), lithographie. Bordeaux, musée Goupil.
Rosa Bonheur, La Famille heureuse (vers 1840), encre sépia, lavis, crayon graphite sur papier. By-Thomery, Château de Rosa Bonheur.
Rosa Bonheur observe les relations qu'entretiennent les animaux et les hommes. Elle les représente aussi bien dans leur rapport de pouvoir que dans leur complicité. Des scènes de la vie rurale décrivent le quotidien des pâtres, charbonniers et travaux des champs. Dans les années 1840, Rosa Bonheur traverse les campagnes. Elle étudie avec beaucoup de précision chaque race rencontrée. Au Salon de 1845, son tableau Labourage lui apporte une médaille de 3ème classe. Suite à ce succès, l'Etat lui commande son premier chef-d'oeuvre : Labourage nivernais.
Rosa Bonheur, Pâtre gardant ses vaches (n.d.), Crayon graphite et lavis d'encre brune sur papier. Barbizon, musée départemental des peintres de Barbizon.
Rosa Bonheur, mouton couché, taureau couché, brebis tondue, bélier couché (1845-1853), bronze à patine brune. Bordeaux, musée des Beaux-Arts.
Edouard Dubufe et Rosa Bonheur, portrait de Rosa Bonheur (1857), huile sur toile. Versailles, musée national des châteaux de Versailles et de Trianon.
Rosa Bonheur connaît un véritable triomphe au Salon de 1853 avec Le Marché aux chevaux. Dans le format d'une peinture d'histoire (2m de haut, 5m de long), Rosa Bonheur peint la puissance des Percherons et la violence des hommes. Pour préparer ce tableau, elle réalise de nombreuses études de détails. Une réplique peinte par Rosa Bonheur et sa compagne Nathalie Micas (1824-1889) était exposée, ainsi qu'une esquisse sur toile à l'échelle du tableau. L'originale exposée à New-York était trop fragile pour voyager.
Rosa Bonheur et Nathalie Micas, Le Marché aux chevaux (1855), huile sur toile. Londres, The National Gallery.
Rosa Bonheur, Esquisse du Marché aux chevaux (vers 1853), Fusain, pierre noire et craie blanche sur toile. By-Thomery, Château Rosa Bonheur.
Rosa Bonheur, études de jambe de cheval (vers 1850-1853). Crayon graphite sur papier. Paris, musée d'Orsay.
Rosa Bonheur, Etude pour le marché aux chevaux (vers 1853), craie noire, lavis gris et rehauts de gouache blanche sur papier. New-York, The Metropolitan Museum of Art.
Rosa Bonheur, Un homme assis à califourchon, dessin préparatoire pour Le Marché aux chevaux (vers 1853), crayon noir et rehauts de gouache blanche sur papier. Paris, musée d'Orsay.
Rosa Bonheur est associée avec des marchands d'art, souvent éditeurs d'estampes comme Gambart et Goupil. Le succès de ces gravures et lithographies, en noir et blanc ou coloriées, permet aux compositions de Rosa Bonheur de pénétrer chez des particuliers, en Europe et aux Etats-Unis.
Emile Lassalle, d'après Rosa Bonheur, Tête de bélier (1852), lithographie sur fond noir. Bordeaux, musée Goupil.
William Henri Simmons, d'après Rosa Bonheur, Le vieil invalide (1882), eau-forte. Londres, ed. L.H. Lefèvre. Nice, musée des Beaux-Arts Jules-Chéret.
Rosa Bonheur voyage afin d'observer animaux et hommes de campagnes et montagnes. Elle voyage surtout en Auvergne, dans le Nivernais, les Landes et Pyrénées. Elle y étudie ânes et moutons qu'elle apprécie beaucoup. La tournée du Marché aux Chevaux organisée par son marchand d'art en 1856, lui permet de se rendre en Ecosse. Elle y découvre les races écossaises dont elle fait de nombreuses études qu'elle utilisera toute sa vie.
Rosa Bonheur, Paysage (n.d.), huile sur toile. Barbizon, musée départemental des peintres de Barbizon.
Rosa Bonheur, Le Sevrage des veaux (1879), huile sur toile. New-York, The Metropolitan Museum of Art.
Rosa Bonheur, Changement de pâturages, dit aussi Une Barque (Ecosse) (1863), huile sur toile. Hambourg, Kunsthalle.
Anna Klumpke (1856-1942) est une portraitiste californienne. Elle étudie à Paris à l'académie Julian et adule Rosa Bonheur dont elle fait le portrait. Les séances de pose les rapprochent. Rosa Bonheur voit en elle la personne idéale pour transmettre sa mémoire à la postérité. En 1898, elle l'invite chez elle et en fait sa légataire universelle, au grand dam de sa famille. Anna Klumpke recueille ses souvenirs et en fait une biographie parue en 1908. A la mort de Rosa Bonheur, elle préserve le domaine de By qui conserve toujours des archives et études de Rosa-Bonheur. Elle est inhumée au Père Lachaise, aux côtés de Rosa Bonheur et Nathalie Micas.
Anna Klumpke, Portrait de Rosa Bonheur (1898), huile sur toile. New-York, The Metropolitan Museum of Art.
Anna Klumpke, Rosa Bonheur, sa vie, son oeuvre (1908). Paris, Ernest Flammarion. Paris, bibliothèque du musée d'Orsay
Dans les années 1850, la renommée et le succès des ventes de Rosa Bonheur, lui permettent d'acquérir le château de By, à Thomery, à l'orée de la forêt de Fontainebleau. Elle y fait construire un grand atelier. En 1860, elle emménage avec Nathalie Micas et sa mère. Elles s'occupent du domaine et du soin des animaux. Ce château est un véritable arche de Noé qui permet à Rosa Bonheur d'étudier au quotidien chiens, chevaux, moutons, fauves, cerfs et sangliers.
Georges Achille-Fould, Rosa Bonheur dans son atelier (1893), huile sur toile. Bordeaux, musée des Beaux-Arts.
Auguste Victor Deroy, d'après Frédéric Théodore Lix, Sa Majesté l'impératrice Eugénie rendant visite à Mlle Rosa Bonheur dans son atelier de Thomery (1864), gravure sur bois rehaussée en couleurs à la main. Fontainebleau, musée national du château de Fontainebleau.
Rosa Bonheur, Tête de lion (1870-1891), huile sur toile. Royaume-Uni, prêté par Sa Majesté Charles III.
A By, Rosa Bonheur étudie les animaux dans leur cadre naturel au cours de longues promenades forestières et dans les champs. Il ne se passe pas un jour sans qu'elle dessine l'attitude ou le regard d'un animal. Elle accumule les études de détails dans lequel elle puise toute sa vie pour créer de nouvelles oeuvres.
Rosa Bonheur, Etude de cheval bai cerise (n.d.), huile sur toile. Fontainebleau, musée national du Château de Fontainebleau.
Rosa Bonheur, Etude de cheval blanc de dos (n.d.), huile sur toile. Chateau de Rosa Bonheur, By-Thomery.
Rosa Bonheur, Etudes de tête de boeuf et d'encolure de boeuf brun (n.d.), huile sur toile. Barbizon, musée départemental des peintres de Barbizon.
Rosa Bonheur, Âne (n.d.), Pierre noire et aquarelle sur papier vélin. Paris, musée des Arts décoratifs.
Rosa Bonheur, Quinze études de cerf (n.d.), aquarelle, encre et crayon sur papier vélin. Paris, musée d'Orsay.
Rosa Bonheur, Vingt-deux études de renard (1890), aquarelle et graphite sur papier. Paris, musée d'Orsay.
Rosa Bonheur, Paysage, étude d'arbre (n.d.), huile sur carton marouflé sur toile. Fontainebleau, musée nationale du château de Fontainebleau.
Les animaux deviennent les sujets de véritables portraits, en pied et grandeur nature. Rosa Bonheur, leur consacre de grandes toiles aux cadrages atypiques et formats panoramiques. Elle porte son attention sur le regard, qui agit comme un lien entre l'homme et l'animal. Pour Rosa Bonheur, les animaux ont une âme, visible à travers les yeux.
Rosa Bonheur, Barbaro après la chasse (vers 1858), huile sur toile. Philadelphie, Philadelphia Museum of Art.
Rosa Bonheur, Tête de chien (1869), fusain et pastel sur papier marron. Bordeaux, musée des Beaux-Arts.
Rosa Bonheur, Cerfs sur les longs rochers (1865), huile sur toile. Sarasota, Florida State University.
Rosa Bonheur, Cerfs au clair de lune (1875), fusain et rehauts de pastel sur papier. Collection particulière.
Rosa Bonheur n'a jamais pu se rendre aux Etats-Unis malgré sa fascination pour les grands espaces de l'Ouest, les habitants autochtones et la faune sauvage. En 1889, Buffalo Bill installe un Wild West Show proche de la capitale, à Neuilly. Pour Rosa Bonheur c'est l'occasion à ne pas manquer pour aller à la rencontre d'acteurs sioux.
Rosa Bonheur, Colonel William F. Cody (1889), huile sur toile. Wyoming, Cody, courtesy of the Buffalo Bill Center of the West.
Rosa Bonheur, Rocky Bear and the Red Shirt (1890), huile sur toile. Cody, Wyoming, Buffalo Bill Center of the West.
Courier Lithographic Company, L'Art perpétue la renommée : Rosa Bonheur peignant Buffalo Bill, Paris (1889/1898), lithographie sur papier. Wyoming, Cody, courtesy of the Buffalo Bill Center of the West.
Rosa Bonheur étudie les fauves de la ménagerie du Jardin des Plantes. Puis, comme aucune législation ne protège les espèces sauvages, elle héberge des lionnes et lions à By. Elle peut les observer longuement et les dessiner au quotidien. Ce qui lui permet de se faire apprivoiser d'eux et de créer une vraie relation. Rosa Bonheur admire leur intelligence et leur noblesse. Pour réaliser ses oeuvres, elle multiplie dessins et esquisses sur le vif.
Rosa Bonheur, Le lion chez lui (1881), huile sur toile. Kingston-upon-Hull, Ferens Art Gallery : Hull Museums.
Rosa Bonheur, Etude de lion, dit aussi le Lion contemplatif (n.d.), pastel, fusain et crayon noir sur papier bleu. Barbizon, musée départemental des peintres de Barbizon.
L'oeuvre de Rosa Bonheur fait partie des réalistes. Des atmosphères brumeuses invitant au rêve forment l'arrière-plan de plusieurs oeuvres. L'amour de Rosa Bonheur pour les chevaux est imprégnée de la vision de Théodore Géricault, dont elle possédait des estampes.
Rosa Bonheur, Les Loups (fumé) (n.d.), lithographie sur papier. By-Thomery, château de Rosa Bonheur.
Rosa Bonheur, Le Duel (1896), fusain et rehauts de craie blanche sur papier. Collection particulière.
Rosa Bonheur, Chevaux sauvages fuyant l'incendie (vers 1880-1899), huile sur toile. Barbizon, musée départemental des peintres de Barbizon.
J'ai beaucoup aimé cette exposition. Je ne connaissais pas les oeuvres de Rosa Bonheur. Des tableaux étaient proches de la précision d'une photo et quelques oeuvres m'ont rappelé celles vues dans l'exposition "Les animaux du Roi" à Versailles. Alors qu'elles ont un siècle de différence !
Le catalogue de l'exposition "Rosa Bonheur (1822-1899), ed. Flammarion, 2022, (288 p.) est un très gros livre de format moyen. Il est imprimé sur du papier mat ce qui ne dénature en rien les reproductions d'oeuvres qui y sont presque toutes reproduites.